Ayoub Yaici

Tumeurs épithéliales

I-Introduction :

Ce sont les tumeurs les plus fréquentes, peuvent être bénignes ou malignes.

Développées à partir des épithéliums de revêtement (épiderme et muqueuses) ou des organes pleins (parenchymes). Ces épithéliums peuvent être de trois types:

  • malpighien ou épidermoïde (comme l’épiderme) ;
  • glandulaire ;
  • urothélial (ou para-malpighien, transitionnel).

Il existe 2 grands types de tumeurs:

-Tumeurs bénignes: nomenclature variable selon le tissu : (papillomes, condylomes, adénomes)

-Tumeurs malignes: carcinomes.

II.Tumeurs à différenciation malpighienne :

II-1-Tumeurs bénignes :

Papillome : Tumeur cutanée (verrue vulgaire) ou muqueuse. Fréquemment d’origine virale (HPV)

Macroscopie tumeur végétante, exophytique (évolue vers l’extérieur), framboisée sur les muqueuses, en saillie

sur le revêtement malpighien qui lui donne naissance.

Histopathologie : 3 critères -papillomatose: crêtes épidermiques allongées

-acanthose: épaississement de la couche épineuse

-hyperkératose : épaississement de la couche cornée

signes de bénignité –architecture conservée

–respect de la membrane basale

–pas d’atypies cyto-nucléaires

–peu de mitoses basales

Condylome :

Généralités Tumeur bénigne liée à l’HPV, transmission sexuelle.

Siège sur les muqueuses: exo-col-utérin, vagin, vulve et zone ano-rectale, plus rarement au niveau pharyngolaryngé.

Macroscopie acuminés (en chou-fleur ou en crête de coq), ou plans.
Microscopie -prolifération bénigne des cellules malpighiennes

-signes d’infection virale

Evolution possible transformation maligne, intéresse les condylomes mais aussi les papillomes :

–risque de dysplasie (état précancéreux)

–puis de cancer (carcinome malpighien): condylomes plans génitaux, certaines papillomatoses des voies aériennes supérieures.

Les papillomes et les condylomes sont parfois multiples : papillomatose (laryngée, fosses nasales), condylomatose (génitale)

II-2-Le carcinome in situ : (ou carcinome intra-épithélial)

-Prolifération localisée à l’épithélium, limitée par la membrane basale qui est respectée.

-S’observe notamment au niveau de la peau (maladie de BOWEN) ou du col utérin.

totalement guérie par exérèse chirurgicale.

II-3-Carcinome des revêtements malpighiens :

Défintion d’un carcinome : Tumeur maligne formée de cellules épithéliales néoformées avec capacité de provoquer des métastases à distance, à un moment quelconque de son évolution. Elle peut apparaître en un endroit quelconque de

l’organisme contenant de l’épithélium. Quand elle dérive d’un épithélium de revêtement, elle peut avoir une différenciation squameuse (carcinome épidermoïde) ou dériver de cellules basales (carcinome basocellulaire). Quand elle dérive d’un épithélium glandulaire, il existe une tendance à la formation de glandes normales. On parle alors d’adénocarcinome. Quand elle dérive d’un épithélium de transition, comme sur les voies urinaires, elle se nomme carcinome transitionnel.

Hormis le carcinome basocellulaire qui ne s’observe que dans le revêtement cutané, tous les autres carcinomes malpighiens sont nommés carcinomes épidermoïdes.

Les carcinomes épidermoïdes :

Même aspect histopathologique signes architecturaux et cytologiques classiques de malignité
différenciation variable, ils peuvent être : bien ou moyennement différenciés : la différenciation épidermoïde est reconnue par la présence de ponts d’union entre les cellules.

Indifférenciés : localisations ubiquitaires, posent des problèmes de classement histologique nécessitant parfois une immuno-histo-chimie (expression intense de Cytokératine).

maturation variable Selon la présence et la qualité de la kératine :

Le carcinome épidermoïde est alors appelé « mature» ou « kératinisant».

II-3-1-Carcinomes cutanés :

Tumeurs très fréquentes, de diagnostic précoce (lésions visibles, prélèvements faciles).

Deux grands types très différents sur le plan clinique et histologique :

carcinomes épidermoïdes (spinocellulaires) Carcinomes basocellulaires
-Généralisés aux épithéliums de revêtement.

-reproduisent la couche des cellules épineuses

>> extension locale >> puis métastases.

limités à la peau.

prolifération ressemblant aux cellules de la couche basale de l’épiderme Extension purement locale, Pas de métastase.

Facteurs de risque :

-Exposition prolongée au soleil, touche surtout les adultes de peau blanche, surtout dans les régions découvertes, (visage, oreilles, nuque, dos des mains).

-Lésions précancéreuses : kératose solaire (ou sénile), radiodermites (lésions causées par les RX), cicatrice de brûlure, ulcères cutanés; Prédisposition génétique (xeroderma pigmentosum)

II-3-2-Carcinomes malpighiens des muqueuses :

Facteurs de risque -Tabac (bronches), association tabac-alcool (ORL, œsophage)

-infection HPV (col, anus)

Localisation -ORL, œsophage, bronches (métaplasie), col utérin, anus

-Métastases ganglionnaires

Macroscopie Tumeur ulcérée, ulcéro végétante, végétante, infiltrante
Aspect histologique même que celui des carcinomes spinocellulaires (architecture maligne classique).

III.Tumeurs urotheliales :

Développées dans l’épithélium urothélial (transitionnel ou paramalpighien) tapissant les voies urinaire : Vessie, uretères, bassinets, Calices.

Evolution : Variable :

-tumeur bénigne isolée.

-tumeur récidivante au fil des années et nécessitant des exérèses itératives.

-carcinome d’évolution rapidement sévère.

Paramètres histo-pathologiques pronostiques :

le stade niveau d’extension dans la paroi vésicale :

-Tumeur vésicale n’infiltrant pas le muscle, TVNIM (stades : pTis-Ta-T1)

-Tumeur vésicale avec infiltration du détrusor, TVIM (stade au moins égal à pT2)

le grade degré de différenciation microscopique (anomalies architecturales, atypies nucléaires, mitoses).

III-1-Tumeurs urothéliales bénignes :

-rares.

-Exp : papillome à cellules transitionnelles de Mostofi et papilome inversé.

III-2-Carcinomes urothéliaux :

-fréquents, touchent les hommes de > 40 ans

-Facteurs de Risque : tabac, exposition professionnelle (colorants), bilharziose.

-souvent multifocaux et récidivants

-importance de la cytologie urinaire pour le dépistage

Les formes papillaires : fréquentes :

Cystoscopie tumeur exophytique (bourgeonnante)
Évolution récidive fréquente, sous forme peu agressive ou sous forme très agressive.
Histologie papilles avec un axe conjonctivo-vasculaire, recouvertes de cellules urothéliales tumorales.

forme non invasive : respect de la membrane basale

forme invasive : franchissement de la MB

Carcinomes urothéliaux non papillaires invasifs :

-ulcéro-infiltrants

-souvent agressifs

-proviennent de lésions planes de carcinome in situ (CIS)

IV.Tumeurs à différenciation glandulaire :

-Tumeurs les plus fréquentes, peuvent être : bénignes: adénomes ou malignes : adénocarcinomes.

-Intéressent les organes creux, les parenchymes glandulaires exocrines et endocrines.

Organe creux TD, canal, excréteur
Parenchyme de type exocrine sein, pancréas exocrine, prostate
Parenchyme de type endocrine thyroïde, parathyroïde, pancréas endocrine

Adénocarcinomes: différenciation variable, comme pour les carcinomes malpighiens :

Différencié la prolifération rappelle le tissu d’origine : architecture glandulaire persistante, aspect sécrétoire.
Peu ou non différencié caractères glandulaires moins nets ou absents: les caractères de différenciation peuvent être mis en évidence par :

-Des colorations histochimiques: Bleu Alcian, PAS (présence de mucus).

-L’immunohistochimie:

-Antigène prostatique spécifique (PSA): Adénome de la prostate.

-Récepteurs hormonaux pour un cancer du sein.

-TTF1 pour un cancer bronchique.

-Les cytokératines pour les tumeurs digestives, ovariennes.

métaplasique la prolifération présente des caractères de tumeurs d’origine différente : adénocarcinome lieberkühnien,

développé dans l’estomac.

IV-1-Tumeurs des organes creux : intéressent les revêtements muqueux glandulaires :

-Muqueuses digestives: estomac, colon et rectum, plus rarement grêle.

-Muqueuses utérines, endomètre, plus rarement endocol

-Voies biliaires et pancréatiques

-Bronches.

IV-1-1-Adénomes colorectaux: polypes sessiles, pédiculés… ils sont bénins, 4 types :

Adénomes tubuleux : prolifération proche des glandes de Lieberkühn
Adénomes villeux : fines digitations, papilles à axes conjonctifs grêles
Adénomes tubulo-villeux : associent les deux aspects précédents.
Adénomes festonnés : Architecture dentelée de l’épithélium.

Ces adénomes peuvent subir des modifications cellulaires et architecturales qui permettent de les classer comme des lésions précancéreuses ou dysplasies (bas et haut grade).

IV-1-2-Adénocarcinomes colorectaux:

Généralités -Très fréquents (la seconde cause de décès par cancer),

-Âge moyen : 60 à 65 ans

-Troubles du transit et hémorragies

Siège (66%) sur le recto-sigmoïde, plus rarement sur le colon gauche, le caecum ou le transverse.
Macroscopie -bourgeonnant

-ulcéro-bourgeonnant

-infiltrant (linite gastrique « inflammation »)

-aspect gélatineux en cas de forte sécrétion de mucus : «carcinome mucineux» ou «carcinome colloïde muqueux»

Microscopie critères de malignité :

-Désorganisation architecturale

-Atypies cyto-nucléaires

-Infiltration

Différenciation (% structures glandulaire) -Bien >95%

-Moyennement: 50-95%

-Peu différencié< 50%

Mucosecrétion très abondante, dissociant les formations carcinomateuses et le stroma carcinome colloïde muqueux
Evolution Extension : traversent progressivement différentes tuniques pariétales vers la séreuse, avec souvent invasion lymphatique.

Métastases : ganglionnaires et hépatiques. Le stade TNM est basé sur le degré d’envahissement de la paroi colique et l’atteinte métastatique.

Relations adénome-cancer :

-Filiation entre tumeur bénigne (adénome) et tumeur maligne (adénocarcinome).

-10 à 15%des adénomes sont susceptibles de cancérisation.

-La grande majorité des adénocarcinomes coliques dérive d’un polype adénomateux.

-Polypose adénomateuse colique familiale : adénomatose caractérisée par le développement progressif de très nombreux adénomes recto-coliques, avec une évolution inéluctable vers l’apparition d’un ou plusieurs adénocarcinomes coliques (mutation du gène APC).

IV-2-Tumeurs des parenchymes exocrines :

Ce sont des tumeurs développées dans des organes pleins :

-Glandes annexes du tube digestif: foie, pancréas, glandes salivaires

-Seins, glandes sudorales

-Ovaires, prostate, reins,…

Le foie, le pancréas, les ovaires sont également le siège de tumeurs endocrines.

a-Caractères communs:

Tumeur bénigne -Unique, arrondie, encapsulée, homogène, de même consistance et de même coloration que le tissu normal voisin qu’elle repousse et déforme.

-Peut être kystique (cystadénome)

Tumeur maligne –Unique, multiple ou nodulaire, de forme irrégulière, mal limitée, (étoilée), dure.

–Remaniements nécrotiques (pouvant réaliser des pseudokystes) et hémorragiques.

–Consistance généralement ferme, sauf en cas de nécrose.

–Peuvent être kystiques (cyst-adénocarcinome), principalement au niveau de l’ovaire.

–Forme particulière : le squirrhe qui est particulier par sa dureté et son caractère rétractile, dû à l’existence d’un stroma fibreux abondant.

b-Glande mammaire:

b.1.Tumeurs bénignes: adénofibromes :

  • Touche la femme jeune.

Tumeurs arrondies, fermes et mobiles

•Prolifération de canaux galactophoriques, 2 assises cellulaires : cylindrique interne et myoépithéliale externe

Pronostic : ils ne récidivent pas si l’exérèse a été complète.

b.2.Tumeurs malignes: carcinome mammaire :

Facteurs de risque -touche une femme sur 8, augmentation du risque avec l’âge.

-importante exposition aux oestrogènes exogènes ou intervalle long entre la puberté et la ménopause.

-obésité, régime riche en graisses,

-cancer de sein familial, BRCA1 & BRCA2

Macroscopie ferme, mal limitée, tumeur stellaire, adhérente, rétraction du mamelon
Microscopie Prolifération bien différenciée

Canalaire infiltrant: structure canalaire, travées ou massif. Lobulaire: cellules non cohésives en files Indiennes

Pronostic •Grade histo-pronostique de Scarff, Bloom et Richardson SBR :

–Degré de différenciation glandulaire

–Importance des anomalies cytonucléaires

–Nombre de mitoses.

•T.N.M : clinique (taille, nombre et siège des adénopathies métastatiques, métastases viscérales)

•Emboles vasculaires, lymphatiques

•Indexe mitotique élevé

V.Tumeurs à différenciation endocrine :

>>Elles sont développées :

–glandes endocrines individualisées (Hypophyse, surrénale, thyroïde, parathyroide, pancréas endocrine)

–système endocrinien diffus, multiples localisations : essentiellement tube digestif et bronches plus rarement thymus, voies biliaires, foie, cellules C de la thyroïde, ovaire, col utérin et peau.

>>Elles peuvent être multiples, dans un même tissu ou dans plusieurs organes dans le cadre d’un syndrome des Néoplasies endocriniennes multiples NEM1 et NEM2.

a-Caractères généraux:

Présence de grains neuro-sécrétoires intra-cytoplasmiques, de nature neuropeptidique et polypeptidique, mise en évidence par :

–Colorations argentiques : grimélius

–Immunohistochimie: chromogranine, synaptophysine, NSE (peu spécifique) définissant le caractère neuroendocrine.

–Recherche de sécrétions spécifiques : gastrine, insuline, VIP

–ME : grains denses intra-cytoplasmiques.

b-Adénomes endocriniens :

Tumeurs benignes se développent sur une glande endocrine. Peuvent sécréter une hormone.

adénomes sécrétants -adénomes parathyroïdiens: élévation de la sécrétion de parathormone >> hypercalcémie

-adénomes thyroïdiens: hyperthyroïdie

adénomes non sécrétants fréquents sur la thyroïde, sur l’hypophyse et, plus rarement sur les glandes corticosurrénales.

Diagnostic : L’examen clinique et/ou l’imagerie médicale permettent d’identifier l’adénome. Seule l’histologie (biopsie) permet d’affirmer le diagnostic.

Évolution et traitement :

Evolution variable selon les localisations. Les adénomes des glandes endocrines peuvent demeurer asymptomatiques et sans danger, les adénomes sécrétants peuvent nécessiter une ablation.

c-Tumeurs endocrine bien différencié: Plus fréquentes.

Macroscopie masse arrondie, unique ou multiple, encapsulée, de coloration jaune ou beige.
Microscopie Travées, ilots, nids, vésicules (thyroïde), séparées les unes des autres par un riche réseau capillaire (stroma endocrinoïde)

•Cellules régulières monotones.

Tumeur carcinoïde : Fréquente dans l’appendice et le grêle, les bronches.

L’architecture carcinoïde typique peut s’observer dans les tumeurs carcinoïdes vraies, sécrétant de la sérotonine et dans des tumeurs endocrines sécrétant une ou plusieurs hormones.

Architecture atypique : Nécrose, entre 2 et 10 mitoses

d-Tumeurs endocrines morphologiquement malignes : Elles sont rares,

-Carcinome médullaire de la thyroïde, Corticosurrénalome malin

Carcinome à petites cellules : observé surtout dans le poumon.

-Petites cellules (Taille 3 fois inférieure au noyau lymphocytaire) indifférenciées « en grain d’avoine », comportant de nombreuses mitoses >10, des nécroses.

-Évolution très rapide, s’accompagne précocement de métastases (ganglions médiastinaux, foie, cerveau, moelle osseuse) rendant la chirurgie inutile.

-Initialement très chimio-sensible.

Chess Bot