HEMATOME RETROPLACENTAIRE

HEMATOME RETROPLACENTAIRE

(HRP)

dr djebbar abdelghani assistant gynecologie obstetrique

ehu oran

Plan du cours

  • I. Introduction
  • II. Définition
  • III. Epidémiologie
  • IV. Etiopathogénie
  • V. Physiopathologie
  • VI. Diagnostic
  • VII. Para clinique
  • VIII. Formes cliniques
  • IX. Diagnostic Différentiel
  • X. Les complications
  • XI. Pronostic
  • XII. Traitement
  • XIII. Prévention
  • XIV. Conclusion

I.Objectifs du cours

  • Evoquer le diagnostic d’ HRP devant toute métrorragie ou douleur abdominale durant le 3 ème trimestre de la grossesse
  • Identifier les patientes à risque
  • Privilégier en 1ere temps le pronostic maternel
  • prise en charge multidisciplinaire
  • Prévenir les récidives par une surveillance intensive .
  • traitement préventif par l’aspirine lors des prochaines grossesses

I.Introduction

  • L’HRP représente 30 % des causes de métrorragies du troisième trimestre.
  • Le pronostic materno-fœtal est sombre, avec une mortalité périnatale de 30 à 50 %.
  • Un HRP se complique souvent de troubles de la coagulation à type de CIVD chez la mère.

II.Définition

  • HRP = Décolement prématuré du placenta normalement inséré ( DPPNI )
  • C’est la collection du sang entre la face maternelle du placenta et la paroi utérine aboutissant à la formation d’un hématome volumineux et compressif
  • Accident aigu paroxystique imprévisible du 3ème trimestre de la grossesse (+/- 2ème trimestre)
  • Urgence obstétricale par excellence
  • La lésion anatomique est constitué d’un hématome décidual basal qui entraîne une rupture brutale, voire une interruption rapide des échanges materno-fœtaux entrainat rapidement :
  1. une souffrance aigue ou la mort du fœtus
  2. des troubles hémodynamiques et des anomalies de la coagulation chez la mère
  • Un HRP grave compliqué de trouble de la coagulation correspond au Syndrome de COUVELAIRE .
  • Une souffrance des tissus de l’utérus suite à l’hémorragie importante est synonyme d’Apoplexie utéro placentaire .

III.Epidemiologie

  • 30 % des métrroragies de 3ème trimestre
  • L’HRP complique moins de 1% des grossesse (0,25 à 0,5 % ) au derniers mois de la gestation
  • HTA gravidique dans plus de 50 % des cas
  • Une mortalité périnatale entre 30 et 50 %
  • Une morbidité néonatale élevée (troubles neurologiques importants des enfants survivants )

IV.Etiopathogénie

    • En dehors de l’HRP post traumatique dans les quels l’hématome est une lésion isolée, l’étiologie exacte de l’HRP n’est pas encore connue mais les facteurs de risques sont :

– HTA gravidique : chronique ou pré-éclampsie (50 % des cas) , maladies vasculaires +++

l’HRP complique 2,3 % des pré-éclampsie ( 24 % de mortalité périnatales) et 10% des HTA chroniques ( 50 % de mortalité périnatales)

– La multiparité , l’âge maternel avancé ( 30 ans ) et chez les très jeunes primigestes (18 ans )

-Tabagisme , éthylisme et toxicomanie ( cocaïne )

-Niveau socio-économique bas

-Antécédents d’HRP

 

-La gémellité

-la rupture prématuré des membranes RPM

    • Traction par le fœtus sur l’insertion funiculaire ( brièveté du cordon etcirculaire du cordon)
    • Thrombophilie congénitale (déficit en protéine C)
    • Hypofibrinogénémie congénitale
    • Carences nutritionnelles : fer ,acide folique , vit B12
    • Présence d’un anticoagulant circulant : AC anticardiolipine
    • Dépassement de terme et malformations fœtales
    • Traumatisme abdominal (accident de la circulation..)
    • traumatisme obstétrical :

-Traumatismes obstétricaux lors de la version par manœuvres externes.

-HRP par amniocentèse surtout lorsqu’elle est faite précocement.

-HRP secondaire à l’évacuation brutale d’un hydramnios .

— La cause d’un décollement placentaire peut toutefois demeurer inconnue, en effet cet accident peut survenir au cours de grossesses en apparence normale, chez des patientes sans facteurs de risque identifiés

V.Anatomopathologie

  • L’aspect macroscopique de l’hématome : caillot arrondi, noirâtre , étendue ( de qq cm à + de 10 cm ), +/- adhérant aux cotylédons et déprimant le placenta en cupule, le sang peut transsuder dans le liquide amniotique.
  • L’hématome est toujours surmonté d’une zone placentaire infarcie associée à des lésions de nécrose ,d’infarctus placentaire , thromboses inter villeuses et utéro-placentaire.
  • Dans les formes graves d’apoplexie utéro placentaire de Couvelaire on peut observer :
    • des lésions écchymotiques
    • suffusion hémorragique ou œdème au niveau des organes de voisinage exceptionnellement à distance : foie, pancréas, reins
    • dilacération musculaire (aspect marbré)
    • parfois le processus hémorragique peut s’étendre au niveau du ligament large et des annexes (trompes et ovaires) et entraîner un hémoperitoine

L’utérus de COUVELAIRE


-utérus apoplectique de couleur noir violacé ,extension intra-myométriale de l’ hématome

-02 risques : la rupture utérine et CIVD

L ’aspect microscopique:

  • La rupture des artères utero-placentaires et les lésions de nécrose ischémique avec vasodilatation des capillaires et thrombose vasculaire peuvent s’étendre au myomètre.

VI.Physiopathologie

  • Le point de départ serait un spasme des artérioles basales, cette interruption du flux est de courte durée et n’entraîne pas de thrombose.
  • Lors de la levée du spasme, l’afflux de sang sous pression rompt les parois vasculaires, et crée des lésions tissulaires au niveau de la plaque basale, ce qui entraîne:
  • La libération de thromboplastines qui sera augmentée par l’hypertonie utérine, ce qui créée une importante
  • Fibrination et une coagulation du sang dans la zone utéro- placentaires;
  • Le fibrinogène se trouve consommé en excès et transformé en fibrine, ainsi survient l’hémorragie et
  • CIVD
  • cependant un phénomène réactionnel combat cette fibrination intra vasculaire excessive, la fibrine est lysée par les fibrinolysines formées sous l’influence d’activateurs d’enzymes provenant aussi du placenta.
  • Une défibrination aura lieu au fur et à mesure de la formation de fibrine et consommation de fibrinogène, cette cascade d’effets nocifs ne sera rompue que par l’évacuation de l’utérus qui supprime la source de thromboplastines et fibrinolysines

 

 

VII.Diagnostic

Forme typique(forme complète)

Accident brutal sans prodrome chez une gestante HTA au 3ième trimestre

    • Douleur abdominale intense et permanente en « coup de poignard » hypogastrique irradiant en arrière avec fréquente diffusion à l’ensemble de l’abdomen.
    • Métrorragies noirâtres souvent modérées sans rapport avec l’état de choc souvent important (hypoTA peut être masquée chez une patiente présentant une HTA gravidique) .

Signes physiques :

      • hyperesthésie cutanée.
      • Utérus hypertonique de ’’bois’’, douloureux à la palpation, cette contraction est permanente, gênant la perception de la présentation fœtale.
      • Les BCF sont souvent absents.
      • Il est classique de noter une élévation brutale (si elle avait été mesurée quelques jours auparavant) de la hauteur utérine.
      • Au spéculum, on peut mettre en évidence un utérus gravide; ainsi que l’origine du saignement.
      • Au toucher vaginal :col dur souvent encore fermé (si ouvert PDE tendues), segment inferieur très bien amplié et dur .

Ce tableau typique est relativement rare

Evaluation de la gravité

classification de Sher:

Grade 1: Discret : métrorragies apparemment isolées.

Grade 2: Modéré : symptomatologie clinique plus complète avec enfant vivant.

Grade 3: Sévère : mort fœtale

3A sans troubles de la coagulation

3B avec troubles de la coagulation

VIII.PARACLINIQUE

  1. Échographie :<<ne doit pas retarder la prise en charge thérapeutique surtout dans la forme complète>>
  • Est d’ intérêt limité pour le Diagnostic, et permet :
  • d’éliminer un PP
  • vérifier la vitalité fœtale
  • suspecter une souffrance fœtale (phase de ralentissement du RCF, bradycardie, diminution des MAF)
  • dans les formes discrètes ou modérées, elle permet le diagnostic de l’hématome ( visualiser l’HRP et apprécier son volume),classiquement elle montre une image typique de L’hématome rétroplacentaire :Zone linéaire, ou lenticulaire biconvexe, bien limitée ,vide d’écho (anéchogène)
  • En pratique le degré d’urgence empêche généralement la réalisation de cet examen dont la sensibilité dans le diagnostic de l’HRP est d’ailleurs faible.
  • Il faut donc accorder a la clinique une priorité absolue.

  1. Le bilan de la coagulation est indispensable dans les formes sévères pour faire le diagnostic de coagulopathie de consommation, voire une fibrinolyse secondaire, on demandera :taux de fibrinogène, de prothrombine, facteur V, facteur VIII, plaquettes, PDF.
  2. L’étude du RCF permet de dire si l’enfant est vivant ou non et s’il existe une souffrance fœtale(apparition de décélérations sont souvent des signes tardifs témoignant déjà d’une anoxie fœtale importante).

Dans 90% des cas, le RCF est strictement normal dans les 24h précédents lasurvenue de l’HRP.

        3.Doppler: des artères utérines et de l’artère ombilicale apporte des résultats intéressant (index diastolique le plus souvent anormal).

IX.Formes cliniques :

Forme fruste : petits hématomes localisés.

  • Signes cliniques discrets ou absents.
  • Accouchement d’un enfant mort.
  • Examen du placenta met en évidence l’hématome dans sa cupule permettant un diagnostic rétrospectif.

Forme trompeuses :

  • Formes peu douloureuses avec saignement abondant simulant un placenta prévia (PP), sans oublier la possibilité d’une association d’où surveillance échographique de tout placenta anormalement inséré.
  • Forme débutant par une hémorragie extragénitale : hématurie, hématémèse.

Formes compliquées :

    • Crise d’éclampsie
    • rupture utérine

Formes d’origine traumatiques :

    • version par manœuvres externes
    • AVP.

Formes très précoces

dans le 2ème ,, ici, seul l’examen anatomopathologique placentaire fera le diagnostic.

Formes pendant le travail,

les métrorragies ne sont évocatrices que si la poche des eaux est encore intacte. de plus l’HRP doit être évoqué lorsque la durée du travail est raccourcie inférieure à 3h (anomalie de la dynamique utérine).

  • AU TOTAL, l’HRP , est de survenue imprévisible , son diagnostic repose sur :
  • La clinique, dans les formes complètes et graves , l’écho a peu d‘intérêt en retardant la mise en route urgente d’un TRT approprié,
  • Dans les autres formes plus fréquentes, l’écho prend tout son intérêt, surtout en salle de travail ,un intérêt diagnostic et pronostic.

X.Diagnostic différentiel :

Hémorragies du 3ème trimestre :

  • Hémorragie d’origine cervicale (examen au spéculum, frottis, biopsies…).
  • Placenta prævia (PP) : sang rouge vif, indolore, avec un bon relâchement entre contractions utérines.

       

 

  • Rupture utérine : notion de césarienne ou autre interventions sur l’utérus, curetage…
  • Hématome décidual marginal (déchirures des veines utéro-placentaires marginales, survient sur un placenta latéral bas situé, et se traduit par un caillot marginal, avec décollement limité, et sans retentissement fœtal).
  • Rupture d’un vaisseau prævia : en cas d’insertion vélamenteuse du cordon (hémorragie de BENKISER).

État de choc (embolie amniotique, choc infectieux).

Syndromes douloureux abdominaux (colique néphrétique, appendicite,

hydramnios).

XI.Les complications:

    • Parmi les multiples complications deux sont redoutables:

L’hémorragie incoercible par trouble de la coagulation, et la nécrose corticale du rein .

  • Les complications maternelles

1.L’hémorragie par trouble de la coagulation:

Les troubles de la coagulation, secondaires d’abord à la défibrination aigue(par consommation du fibrinogène au niveau du caillot),et aggravés par la coagulation intra vasculaire disséminée (par passage dans la circulation maternelle de thromboplastines déciduales et de facteurs de coagulation activés )

A ce stade le pronostic est toujours réservé et l’ évolution peut être rapidement fatale vers l’ état de choc hypo volumique et la défaillance multi viscérale.

2.La nécrose corticale du rein :

l’évolution se fait soit vers l’insuffisance rénale aigue rapidement mortelle, soit vers l’insuffisance rénale chronique

3.La nécrose corticosurrénale :

Accompagne la nécrose corticale rénale, le pronostic est sombre

et incompatible avec la vie.

4.La nécrose hypophysaire :

le Syndrome de Sheehan (Aménorrhée post-partum avec régression partiel des caractères

sexuels secondaires ).

5.Hémorragie de la délivrance : double origine :

a.coagulopathie de consommation

b.L’atonie utérine :

6.Apoplexie utéro-placentaire(utérus de Couvelaire):

aspect noir et violacé, impressionnant (extravasation de sang dans le myomètre et la sous-séreuse de l’utérus )

  • complications fœtales

pronostic fœtal sombre ,séquelles neurologiques, risques de prématurité.

● récidive de l’HRP lors des grossesses suivantes: 10 à 30 %.

  • Mortalité maternelle est à 0,1 % – foetale 30 à 50 %

 

 

 

XII.pronostic:

Pronostic Fœtal mauvais en fonction de :

    • l’étendu du décollement
    • Des lésions utérines associées
    • De l’importance du choc
    • Mortalité élevée 70% si retard de diagnostic de plus de 2h.
    • Morbidité par hypotrophie, prématurité, souffrance fœtale,

Pronostic Maternel lié à:

  • L’état de choc,
  • Troubles de la coagulation,

XIV.Traitement:

  • Hospitalisation,
  • Restaurer les pertes sanguines,
  • Assurer l’hémostase
  • Ceci, en évacuant l’utérus.

Cette prise en charge est multidisciplinaire

CAT en urgence:

En salle de travail, on instaure:

  • De larges voies d’abord veineuses,
  • Oxygénothérapie,
  • Une sonde urinaire,
  • Antibiothérapie à large spectre.
  • Si possible, un cathéter de mesure de la PVC.

Le bilan sanguin initial comporte : groupage et rhésus ,hématocrite ,bilan de la crase sanguine.

COMPENSER LES PERTES: à l’aide de solutés de remplissage,surtout le sang frais,et le contrôle de la PVC permet d’éviter les surcharges.

ASSURER L’HEMOSTASE:

les TRB de la coagulation sont combattus en apportant les facteurs déficitaires ,sang frais et PFC , fibrinogène en perfusion lente.

L’évaluation des TRB de l’hémostase sera faite d’heure en heure ,ainsi ,sont

considérés comme graves :

  • des taux de fibrinogène inférieur à 1 gr
  • et plaquettes inférieur à 50000/mm3 .

dans ce cas il n’est pas possible,d’envisager des interventions chirurgicales sans courir de gros risques pour la mère,donc compenser ces TRB avant tout geste.

Traitement obstétrical:

    • Extraction en urgence du fœtus (au max dans les 6 h après le début de l’HRP)
    • Délai acceptable pour VB modulable selon l’état maternel : 4-18h
    • Césarienne difficile, à haut risque hémorragique.
      • Si le fœtus est vivant : extraction par césarienne 95% des cas
      • (NB : si l’accouchement est imminent, on peut espérer l’accouchement par voie basse => peu réalisé (5% des cas )
      • Si le fœtus est mort :
        • Rupture artificielle des membranes peut suffire à l’expulsion rapide par voie basse
        • En dernier recours : la césarienne car le risque hémorragique per et post op + laisser un utérus cicatriciel pour un enfant mort.

NB : La césarienne sera pratiquée sous AG (CI à la péridurale du fait du risque de troubles de la coagulation)

-Césarienne :

s’impose rapidement si:

  • le fœtus est vivant ,et que l’ACCT n’est pas imminent,
  • Et si le fœtus est mort , en cas de gravité de l’état maternel.

-Accouchement par voie basse:

  • Quand fœtus vivant, si hématome modéré , sans signes de SFA,
  • et si l’accouchement évolue rapidement après rupture des membranes et perfusion.

Quand le fœtus est mort ou non viable , avec un état maternel stable .

  • La révision utérine, est systématique,de même que l’utilisation

d’ocytociques pour prévenir l’atonie utérine.

  • L’hystérectomie d’hémostase: est exceptionnelle,ici on peut parler de l’utérus de couvelaire qui ne doit guère conduire à l’hystérectomie,car

possibilité d’obtenir une bonne rétraction compatible avec une hémostase satisfaisante.

Les suites de couches, ATB,net anticoagulants.

 

XIII.Prévention:

Meilleur dépistage de la population à risque ( HTA gravidique ,ATCD d’HRP ,de MIU, le syndrome des anti phospholipide )

Si antécédent d’HRP(récidive de 6% à 10%): surveillance intensive avec hospitalisation

–l’accouchement si condition obstétricales favorables est déclenché dés 37 SA.

Antécédents d’un ou 2 HRP survenus dans un contexte d’HTA ou RCIU :

-prescrire l’aspirine 50 à 100 mg par jour.

-Le traitement est généralement débuté entre 14 et 17 SA, arrêt au alentour de 34 S.

Cette population doit subir un bilan dés le premier trimestre :

-surveillance de la TA

-uricémie ,créatinémie

-FNS

-TP, TS , facteurs de coagulation

XIV.Conclusion:

  • L’HRP est une urgence obstétricale.
  • malgré les progrès portant sur une meilleur connaissance des modifications cliniques, biologiques et échographiques, pouvant précéder l’HRP ainsi que la prévention de récidive par l’utilisation de l’aspirine l’HRP reste une complication sévère de la grossesse qu’il faut savoir maîtriser.
  •  Il peut toucher toute femme enceinte, toutefois la connaissance des FDR peut aider à le prévenir.

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