CHAPITRE V
Les troubles de la fonction motrice
La motricité est sous la dépendance de plusieurs structures nerveuses : système pyramidal, système extra-pyramidal et cervelet dont l’intégrité est nécessaire afin que le mouvement puisse s’accomplir de manière normale.
Les troubles de la fonction motrice sont de trois grands types :
- Les paralysies qui sont une diminution ou une abolition de la motricité volontaire.
- Les syndromes extra-pyramidaux au premier rang desquels se place le syndrome parkinsonien.
- Les troubles moteurs divers dont la physiopathologie est encore obscure et qui réali- sent des mouvements anormaux.
I.LES PARALYSIES
1.Définition
La paralysie est une diminution ou une abolition de la motricité volontaire.
2.Rappel anatomo-pathologique
La motricité volontaire est possible grâce au système pyramidal, au neurone moteur périphérique et aux muscles.
2.1Le système pyramidal (fig. 1) : commence au niveau de l’aire motrice frontale ascendante, descend dans la capsule interne, traverse les pédoncules cérébraux, la protubé- rance et croise dans la partie inférieure du bulbe au-dessous des noyaux d’origine des nerfs crâniens réalisant le faisceau pyramidal croisé qui descend dans le cordon latéral de la moelle épinière. Une petite partie du faisceau pyramidal ne croise pas dans le bulbe et forme le faisceau pyramidal direct qui descend dans le cordon antérieur de la moelle et qui est destiné presque entièrement à la région cervicale.
Une lésion du système pyramidal entraîne une paralysie dite centrale.
Noyaux moteurs des nerfs crâniens
FIG. 1. — Le système pyramidal.
2.2Le neurone moteur périphérique (fig. 2) : débute au niveau de la corne antérieure de la moelle qui donne naissance aux fibres nerveuses qui vont former la racine antérieure, celle- ci va rejoindre la racine postérieure pour donner le nerf rachidien.
Les nerfs rachidiens vont s’anastomoser pour former les plexus d’où naîtront les nerfs périphériques qui vont innerver les muscles.
Une lésion du neurone moteur périphérique entraîne une paralysie dite périphérique.
2.3Les muscles : une anomalie musculaire pourra entraîner une diminution de la motricité volontaire soit par atteinte de la jonction neuromusculaire; soit par atteinte du muscle lui- même.
FIG. 2. — Le neurone moteur périphérique (exemple nerfs rachidiens-plexus brachial et nerfs périphériques du membre supérieur).
3.Etude sémiologique des paralysies
3.1L’existence d’une paralysie sera dépistée par l’examen clinique qui va d’abord apprécier la force musculaire globale en étudiant l’exécution des mouvements volontaires : poignée de main, flexion contrariée de l’avant-bras…
Certaines manœuvres permettront de dépister une paralysie incomplète ou parésie :
— Aux membres supérieurs : l’épreuve des bras tendus qui met en évidence un déficit moteur portant sur le triceps brachial et les extenseurs des doigts.
— Aux membres inférieurs :
- L’épreuve de Barré (fig. 3) : le sujet est placé en décubitus ventral, les jambes fléchies à
angle droit sur les cuisses.
- L’épreuve de Mingazzini (fig. 4) : le sujet est placé en décubitus dorsal, les cuisses et les jambes fléchies à angle droit.
Ces deux épreuves mettent en évidence un déficit portant sur les muscles raccourcisseurs; en cas de déficit moteur, on observe une chute de l’un ou des deux membres.
Lorsqu’un déficit moteur est détecté, on apprécie l’étendue et le degré des paralysies par une étude de la force musculaire de chaque segment paralysé ou force musculaire segmentaire. Elle est étudiée en demandant au sujet d’exécuter un mouvement contre résistance ce qui permet d’apprécier la force musculaire des différents muscles de manière
FIG. 4. — Epreuve de Mingazzini (hémiparésie gauche).
comparative des deux côtés du corps. Ainsi, le degré de la paralysie pour chaque muscle est coté suivant sa gravité de 0 à 5 : c’est le testing musculaire.
- 0 : pas de contraction musculaire visible.
- 1 : contraction musculaire visible mais qui n’entraîne pas de déplacement.
- 2 : mouvement possible après élimination de la pesanteur.
- 3 : mouvement possible contre la pesanteur.
- 4 : mouvement possible contre la pesanteur et résistance.
- 5 : force musculaire normale.
3.2L’examen des réflexes ostéo-tendineux et cutanés doit être systématique; ils peuvent être normaux, abolis ou augmentés. Leur appréciation va permettre de préciser le type de la paralysie : des réflexes ostéo-tendineux vifs avec clonus inépuisable, signes de Hoffmann et Rossolimo et signe de Babinski signent l’atteinte du faisceau pyramidal.
3.3L’examen du tonus : est également indispensable et montrera soit une hypotonie: soit une hypertonie spastique qui est toujours en rapport avec une lésion du faisceau pyramidal.
3.4L’examen de la sensibilité doit être systématique.
3.5Enfin, on recherchera des troubles trophiques : une atrophie musculaire accompagnée ou non de fasciculations qui signe l’atteinte du neurone périphérique.
4.Le diagnostic différentiel
Les paralysies ne devront pas être confondues avec :
4.1-Des troubles de la motilité liés à une lésion ostéo-articulaire : une lésion articulaire à type d’arthrite peut entraîner une impotence fonctionnelle avec atrophie musculaire qui peut être confondue avec une atteinte motrice périphérique.
4.2-Trouble de la motricité lié soit à une rétraction tendineuse ischémique dans le syndrome de Volkmann; soit à une rétraction de l’aponévrose palmaire dans la maladie de Dupuytren.
4.3-Troubles moteurs dus à une atteinte du système extra-pyramidal.
4.4-Troubles de la motricité fine des doigts en rapport avec une abolition de la sensibilité profonde.
4.5-Enfin, la simulation; dans ce cas les signes objectifs sont absents.
5.Les différents types de paralysies
Une paralysie peut être due soit à une atteinte du système pyramidal, soit à une atteinte du neurone moteur périphérique, soit à une atteinte musculaire.
5.1Les paralysies centrales : sont en rapport avec une atteinte du système pyramidal. Deux types de lésion peuvent être rencontrés :
- Une lésion unilatérale qui siège le plus souvent sur le trajet intracrânien du faisceau pyramidal : elle réalise une hémiplégie située du côté opposé à la lésion (controlatérale): beaucoup plus rarement, elle peut siéger au niveau de la moelle réalisant une hémiplégie située du même côté que la lésion (homolatérale).
- Une lésion bilatérale : siégeant au niveau de la moelle qui entraîne une quadriplégie ou plus souvent une paraplégie.
5.1.1-Caractères communs : quel que soit le type de la lésion unilatérale ou bilatérale, le syndrome pyramidal possède des caractères communs :
Le déficit moteur : est de degré variable; la paralysie peut être complète mais en fait le plus souvent, elle est partielle.
— Elle respecte les muscles à action synergique : muscles du cou, du tronc, du larynx. le diaphragme et les oculomoteurs.
- Elle prédomine sur certains muscles au niveau de chaque segment du corps atteint :
- A la face la paralysie prédomine sur le territoire facial inférieur.
- Aux membres supérieurs : elle intéresse essentiellement les extenseurs et les supinateurs.
- Aux membres inférieurs : elle atteint les raccourcissements et les abducteurs. Les troubles du tonus sont habituels :
— Soit hypotonie : dans les atteintes brutales et sévères de la voie motrice principale au stade initial; cette hypotonie est ensuite remplacée par une hypertonie. .
— Soit hypertonie : qui est habituelle au cours des lésions chroniques de la voie pyramidale, il s’agit d’une hypertonie en extension qui dans les lésions sévères peut évoluer vers l’hypertonie en flexion.
Les troubles des réflexes :
— Les réflexes ostéo-tendineux :
- L’aréflexie ostéo-tendioeuse est habituelle au stade initial des atteintes sévères de la voie pyramidale, elle accompagne l’hypotonie. Elle s’observe également au cours des hypertonies en flexion.
- L’hyper-réflectivité ostéo-tendineuse est habituelle dans les formes avec hypertonie; elle s’accompagne de clonus et de réflexes proprioceptifs pathologiques : signe de Hoffmann et signe de Rossolimo.
— Les réflexes cutanés :
- Le signe de Babinski est le signe le plus caractéristique d’une atteinte du faisceau pyramidal, il se voit dans les formes hypotoniques et dans les formes hypertoniques.
- Les réflexes cutanés abdominaux et crémastériens sont habituellement abolis.
Les autres signes :
— Il n’existe pas d’amyotrophie; sauf l’amyotrophie globale qui peut être due à
l’immobilisation prolongée.
— Les troubles sphinctériens sont seulement retrouvés dans les atteintes bilatérales.
5.1.2-Les hémiplégies :
Définition : l’hémiplégie est une paralysie d’un hémicorps, elle est due à une atteinte d’un seul faisceau pyramidal.
_ Etude sémiologique : les hémiplégies sont de plusieurs types :
Suivant leur ancienneté on distingue :
a)L’hémiplégie flasque : qui est observée à la phase initiale d’une lésion aiguë du faisceau pyramidal.
- Elle est facile à reconnaître chez le malade conscient, elle associe :
- Une paralysie flasque d’un hémicorps prédominant sur les extenseurs et les supinateurs au membre supérieur et sur les raccourcisseurs et les abducteurs au membre inférieur.
- Une hypotonie.
- Une diminution ou une abolition des réflexes ostéo-tendineux.
- Un signe de Babinski unilatéral et une abolition des réflexes cutanés abdominaux et crémastériens.
- Une paralysie faciale de type central.
- Elle est plus difficile à reconnaître chez le malade dans le coma.
- Au niveau de la face, on observe :
- une déviation conjuguée de la tête et des yeux (le malade regarde sa lésion cérébrale et se détourne de son hémiplégie);
- une hypotonie de la face du côté paralysé : « le malade fume la pipe » (soulèvement expiratoire de la joue);
- un signe de Pierre Marie et Foix : la compression du nerf facial en arrière de la branche montante du maxillaire inférieur entraîne une grimace du côté sain.
- Au niveau des membres, on retrouve une hypotonie des membres plus marquée du côté de l’hémiplégie avec :
- une chute plus rapide et plus lourde des membres du côté paralysé;
- un signe de Raimiste : l’avant-bras étant placé verticalement, la main retombe plus rapidement et plus complètement du côté atteint.
- Un signe de Babinski unilatéral.
- Les réflexes ostéo-tendineux sont diminués ou abolis.
b)L’hémiplégie spasmodique : au bout de quelques semaines, l’hémiplégie passe à la spasmodicité.
Elle est caractérisée par une hypertonie de type pyramidale.
Le malade marche en fauchant.
- Suivant la topographie de la lésion, on distingue :
1.L’hémiplégie corticale : elle est partielle, non proportionnelle et incomplète. La lésion siège au niveau du cortex où le faisceau pyramidal est étalé et il ne sera donc atteint qu’en partie : soit atteinte faciale ou brachio-faciale, soit atteinte crurale.
Elle est associée à des troubles de la sensibilité profonde avec astéréognosie et à une
épilepsie Bravais-Jacksonienne : tous ces signes siègent du côté opposé à la lésion.
Lorsque l’hémiplégie est droite, une aphasie est souvent retrouvée.
1.L’hémiplégie capsulaire : elle est totale : proportionnelle et complète. La lésion siège au niveau de la capsule interne, le faisceau pyramidal est donc atteint dans sa totalité.
L’hémiplégie est pure : il n’y a pas de troubles sensitifs associés; elle siège du côté opposé à la lésion.
2.L’hémiplégie capsulo-thalamique : réalise le syndrome de Dejerine-Roussy qui associe :
-
- Une hémiparésie.
- Des troubles visuels à type d’hémianopsie latérale homonyme.
- Des troubles sensitifs : troubles de la sensibilité profonde et de la sensibilité thermo- algésique, et troubles sensitifs subjectifs à type d’hyperpathie (perception douloureuse de tous les stimulus).
Tous ces signes sont retrouvés du côté opposé de la lésion.
3.Les hémiplégies dues à une atteinte du tronc cérébral réalisent un syndrome alterne qui associe : une hémiplégie du côté opposé à la lésion et une paralysie d’un ou plusieurs nerfs crâniens de type périphérique du côté de la lésion.
- Hémiplégie pédonculaire : réalise le syndrome de Weber : paralysie du III du côté de la lésion et hémiplégie controlatérale.
- Hémiplégie protubérantielle : réalise le syndrome de Millard-Gubîcr : paralysie du VII de type périphérique avec ou sans paralysie du VI du côté de la lésion et hémiplégie controlatérale.
- Hémiplégie bulbaire : paralysie du XII et paralysie du noyau ambigu (IX-X-XI) du côté de la lésion et hémiplégie controlatérale.
Une forme particulière, c’est le syndrome de Wallenberg ou syndrome latéral du bulbe qui associe une anesthésie dans le territoire du V du côté de la lésion et une hémiparésie avec hémianesthésie thermo-algésique du tronc et des membres du côté opposé à la lésion.
4.L’hémiplégie spinale : réalise le syndrome de Brown Séquard.
- Une paralysie de la motricité volontaire avec troubles de la sensibilité proprioceptive du côté de la lésion.
- Des troubles de la sensibilité thermo-algésique du côté opposé à la lésion.
5.1.3-Les paraplégies
Définition : la paraplégie est une paralysie des deux membres inférieurs due à l’atteinte bilatérale des faisceaux pyramidaux par lésion médullaire siégeant au-dessous du renfle ment cervical.
Une lésion médullaire siégeant au-dessus du renflement cervical donnera une quadriplégie.
_ Etude sémiologique : suivant leur mode d’installation et leur évolution, on distingue :
a)La paraplégie flasque : elle se voit au stade initial des lésions médullaires aiguës (section médullaire traumatique); elle associe :
- Une perte complète de la motricité des membres inférieurs.
- Une hypotonie.
- Une abolition des réflexes ostéo-tendineux.
- Un signe de Babinski bilatéral (qui permet de la différencier d’une atteinte du neurone moteur périphérique).
- Des troubles sensitifs à tous les modes dont la limite supérieure permet de faire le diagnostic topographique de la lésion.
- Des troubles sphinctériens.
b)La paraplégie spasmodique : elle peut soit succéder à une paraplégie flasque; soit s’observer d’emblée au cours des lésions chroniques essentiellement au cours des compres- sions médullaires; elle associe :
- Une paralysie prédominant sur les raccourcisseurs et les abducteurs. Au stade de début, la paralysie peut être fruste et réaliser le tableau de la claudication intermittente spinale qui est une fatigabilité à la marche : au bout d’une certaine distance le malade est obligé de s’arrêter, après un repos la marche peut être reprise, il est à noter que cette fatigabilité ne s’accompagne pas de douleur ce qui permet de la différencier de la claudication intermittente d’origine artérielle.
- Une hypertonie de type pyramidal prédominant sur les extenseurs et les adducteurs.
- L’association de la paralysie et de l’hypertonie va être responsable, lorsque celle-ci est possible, de la démarche particulière sautillante, de gallinacé.
- Une hyper-réflectivité ostéo-tendineuse.
- Un signe de Babinski bilatéral.
- Des troubles sensitifs à tous les modes.
- Des troubles sphinctériens.
e)La paraplégie en flexion : peut succéder à une paraplégie spasmodique en extension, elle se voit dans les lésions médullaires graves ; elle est caractérisée par une perte de la motricité des membres inférieurs qui sont fixés en triple retrait.
Les réflexes ostéo-tendineux sont abolis. Le signe de Babinski est bilatéral.
5.2Les paralysies de type périphérique : sont en rapport avec une atteinte du motoneurone périphérique : corne antérieure de la moelle, racines rachidiennes, plexus ou nerfs moteurs.
5.2.1-Caractères communs :
Troubles moteurs :
— Paralysie flasque avec hypotonie.
- Abolition des réflexes ostéo-tendineux dans le territoire paralysé.
- Amyotrophie souvent associée à des fasciculations.
- Troubles vasomoteurs : cyanose, refroidissement et troubles sudoraux.
Troubles sensitifs :
- Subjectifs à type de douleurs ou de paresthésies.
- Objectifs : anesthésie complète portant sur tous les modes de sensibilité.
5.2.2-Le syndrome de la corne antérieure réalise :
- Une paralysie flasque asymétrique intéressant surtout les muscles proximaux : deltoïde au membre supérieur, quadriceps au membre inférieur.
- Une atrophie musculaire.
- Des troubles vasomoteurs importants.
- Une absence de troubles sensitifs objectifs.
La valeur sémiologique du syndrome de la corne antérieure est la poliomyélite antérieure aiguë.
5.2.3-Les syndromes radiculaires :
Caractères généraux :
— Les troubles sensitifs : sont très importants, dominés par les troubles sensitifs subjectifs à type de douleur dont le trajet est caractéristique, qui est provoquée ou augmentée par la toux, la défécation (manœuvres qui augmentent la pression dans le liquide céphalo-rachidien) et les manœuvres d’élongation de la racine par exemple la manœuvre de Lasègue en cas de sciatique.
Les troubles sensitifs objectifs sont absents.
- Les troubles moteurs : sont discrets à type de parésie, car chaque muscle est innervé par plusieurs racines sauf les muscles caractéristiques de Shliack.
- Aux membres supérieurs : le deltoïde (C5), le biceps (C6), le triceps et l’éminence thénar (C7), l’éminence hypothénar (C8).
- Aux membres inférieurs : le quadriceps (L3), le jambier antérieur (L4), l’extenseur propre du gros orteil (L5), le péronier (SI).
- Les troubles des réflexes ostéo-tendineux correspondant à la racine atteinte. Les différents syndromes radiculaires :
— Le syndrome mono-radiculaire : exemple : la sciatique L5 ou SI par hernie discale (voir sixième partie : appareil locomoteur).
- Le syndrome pluri-radiculaire : le syndrome de la queue de cheval est dû à une lésion du canal rachidien siégeant au-dessous du cône terminal de la moelle : jonction Ll-L2; il s’agit habituellement d’une atteinte des racines sacrées.
Ce syndrome associe :
- Des troubles sensitifs : à type de douleurs surtout au début et une anesthésie en selle
touchant la région périnéale et les organes génitaux externes.
- Des troubles moteurs : paralysie flasque dans le territoire des racines sacrées :
muscles fessiers, ischio-jambiers, triceps suraux; avec troubles réflexes : abolition du réflexe achilléen.
- Des troubles génito-urinaires : avec impuissance et troubles urinaires avec incontinence ou rétention et perte du besoin d’uriner.
Le syndrome de la queue de cheval doit se différencier du syndrome du cône terminal au cours duquel on retrouve un signe de Babinski bilatéral.
- Le syndrome radiculaire diffus ou polyradiculonévrite, il associe :
- Des troubles moteurs : paralysies flasques plus ou moins intenses, symétriques avec paralysies des nerfs crâniens.
- Des troubles sensitifs : à type de paresthésies.
- Des troubles des réflexes ostéo-tendineux qui sont abolis.
- Des anomalies du liquide céphalo-rachidien à type de dissociation albumino-cytologique (élévation du taux d’albumine et cytologie normale).
5.2.4-Les syndromes plexiques : l’atteinte du plexus brachial est la plus fréquente, elle réalise une atteinte pluri-radiculaire ; elle est le plus souvent d’origine traumatique.
— Une atteinte globale du plexus brachial réalise une paralysie totale avec anesthésie du membre supérieur.
- Une atteinte partielle du plexus brachial va être :
- Soit de type supérieur (C5-C6) : type Duchenne-Erb : va entraîner une paralysie de la racine du membre supérieur.
- Soit de type moyen (C7) : type Remak : va se manifester par une paralysie de l’extension du coude, du poignet et des doigts.
- Soit de type inférieur (C8-D1) : type Klumpke qui entraîne une paralysie des muscles des doigts et du pouce.
Ces atteintes s’accompagnent de troubles sensitifs dans les territoires radiculaires correspondants.
5.2.5-Les syndromes tronculaires : l’atteinte d’un nerf va entraîner la paralysie de plusieurs muscles. Le syndrome tronculaire associe des troubles moteurs et des troubles sensitifs dans le territoire d’innervation cutanée du nerf.
Les principaux nerfs qui peuvent être atteints sont :
- Le nerf radial : qui va donner la main tombante : la main « tombe en fléau » : flexion et pronation (fig. 5).
- Le nerf cubital : se manifeste par la main en griffe : qui réalise une griffe cubitale : flexion des deux derniers doigts (fig. 6).
- Le nerf médian : réalise la main simiesque : qui est la main plate par amyotrophie de l’éminence thénar (fig. 7).
- Le nerf grand dentelé : est responsable de la scapula alata : qui est un décollement et une bascule de l’omoplate en dehors.
- Le nerf sciatique poplité externe : réalise le pied tombant qui est responsable du steppage : lors de la marche ou lors de la montée des escaliers, la pointe du pied bute contre le sol du fait de l’atteinte des muscles de la loge antéro-externe de la jambe (fig. 8).
- Le nerf phrénique : va être responsable d’une paralysie de l’hémidiaphragme. L’atteinte diffuse de plusieurs nerfs : lorsqu’elle est symétrique réalise la polynévrite, lorsqu’elle est asymétrique il s’agit d’une multinévrite.
— La polynévrite : est un syndrome moteur et sensitif bilatéral et symétrique de topographie distale, avec paresthésie et hypoesthésie tactile « en gant » ou « en chaussette ».
- La multinévrite : est un syndrome moteur et sensitif qui est asymétrique.
5.3. Les troubles moteurs d’origine musculaire peuvent être de deux types :
5.3.1-Atteinte primitive des muscles ou myopathies qui associent :
- Des paralysies progressives prédominant aux racines des membres.
- Une atrophie musculaire, parfois une pseudo-hypertrophie.
- L’absence de fasciculations.
- L’absence de troubles sensitifs.
- Des réflexes ostéo-tendineux qui peuvent être conservés.
- L’abolition du réflexe idio-musculaire.
5.3.2-Atteinte de la jonction neuro-musculaire ou myasthénie qui est une fatigabilité à l’effort répété, qui régresse au repos et après injection de Prostigmine. Elle porte essentiellement sur :
- Les muscles oculomoteurs : responsable de diplopie et d’un ptosis.
- Les muscles masticateurs : avec gêne à la déglutition.
- Les muscles des racines des membres.
II.LES SYNDROMES EXTRA-PYRAMIDAUX
Les lésions du système extra-pyramidal vont se manifester par des troubles de la motricité involontaire qui réalisent des mouvements anormaux associés à des troubles du tonus à type d’hypotonie ou d’hypertonie avec conservation de la motricité volontaire.
Les syndromes extra-pyramidaux sont dominés par le syndrome parkinsonien, les autres syndromes extra-pyramidaux sont plus rares, ce sont : l’athétose, les dystonies, la chorée et l’hémiballisme.
1.Rappel anatomo-physiologique du système extra-pyramidal (fig. 9)
Le système extra-pyramidal est annexé à la voie motrice principale; il aboutit au motoneurone périphérique.
Anatomiquement, il est formé des noyaux gris centraux : noyau caudé, putamen, pallidum, corps de Luys, noyau rouge, locus niger qui aboutissent à une série de faisceaux :
rubro-spinal, réticulo-spinal, vestibulo-spinal. Ces faisceaux cheminent dans le cordon antéro- latéral de la moelle.
Le rôle du système extra-pyramidal est la régulation du tonus musculaire et son adaptation
à la posture et au mouvement.
2.Les différents syndromes extra-pyramidaux
2.1Le syndrome parkinsonien : est en rapport avec des lésions du locus niger, acces- soirement du pallidum.
Il est caractérisé par trois signes : le tremblement parkinsonien, l’akinésie et l’hypertonie.
FIG. 9. — Le système extra-pyramidal.
2.1.1-Le tremblement parkinsonien : est un tremblement de repos; c’est un mouvement rythmique régulier de fréquence modérée en moyenne six mouvements par seconde, l’amplitude variable le plus souvent modérée, il prédomine aux extrémités distales : il débute à l’extrémité du membre supérieur où il réalise des mouvements alternés de flexion-extension des doigts et d’adduction-abduction du pouce, on dit que le malade « émiette du pain, roule une cigarette ou compte la monnaie ». Au membre inférieur, il réalise un mouvement de flexion-extension du pied : classique mouvement de pédale.
Ce tremblement apparaît au repos, il augmente d’amplitude avec les émotions, la fatigue et l’effort de concentration intellectuelle; il disparaît lors du mouvement volontaire et pendant le sommeil.
2.1.2-L’akinésie : est caractérisée par la réduction et la lenteur des mouvements. Le malade est spontanément immobile, son expression gestuelle est appauvrie :
— Au niveau du visage : on note une rareté du clignement et la réduction de la mimique qui donne au malade un masque, figé, inexpressif, ne reflétant plus les émotions.
— Lors de la marche, il existe une diminution du balancement des bras. Le malade a également des difficultés à exécuter de façon rapide les mouvements alternatifs : épreuve des marionnettes, on assiste à une diminution rapide de l’amplitude des mouvements.
2.1.3-L’hypertonie : est une hypertonie de type extra-pyramidal (voir Chapitre II), elle est plastique et diffuse, elle ne s’accompagne pas de déficit moteur et les réflexes ostéo-tendineux sont normaux. L’association de l’akinésie et de l’hypertonie est responsable de l’attitude générale en flexion du parkinsonien : la tête et le tronc sont inclinés en avant, les membres supérieurs demi-fléchis et en adduction, les genoux également demi-fléchis (fig. 10). Cette tendance à la flexion persiste dans le décubitus : c’est le signe de l’oreiller : la tête du malade privée de support ne retombe que lentement sur le plan du lit.
FIG. 10. — Attitude générale en flexion du malade parkinsonien.
2.2Le mouvement athétosique : est un mouvement involontaire lent et incessant, intéressant les extrémités des membres et la face.
- Au membre supérieur : il atteint surtout la main et les doigts : il s’agit de déplacements lents et asynchrones des doigts avec écartement et alternances de flexion extension des articulations métacarpo-phalangiennes comparés à des mouvements de tentacule de pieuvre; le plus caractéristique est un mouvement d’extension et de pronation du poignet réalisant un mouvement de reptation ou d’enroulement.
- AU membre inférieur : on note une hyper-extension spontanée des orteils simulant un signe de Babinski.
- A la face : le mouvement athétosique siège au niveau de la région buccale réalisant des grimaces lentes.
Le mouvement athétosique se développe sur un fond d’hypertonie, il est aggravé par la fatigue et les émotions; il s’atténue au repos et disparaît pendant le sommeil.
2.3Les dystonies : réalisent des contractions toniques involontaires et intermittentes localisées à certains groupes musculaires. Ces contractions entraînent des déplacements lents et soutenus, sans rythme ; elles surviennent lors du maintien des attitudes ou lors de l’exécution des mouvements volontaires ; elles sont exagérées par les émotions ; elles dispa- raissent lors du repos et pendant le sommeil.
On distingue :
2.3.1-La dystonie d’attitude : atteint les muscles de la statique du tronc réalisant des
incurvations variées lors de la station debout et de la marche :
-
- Hyperlordose.
- Inflexion latérale.
- Rotation (spasme de torsion).
Certains mouvements sont capables dé les faire disparaître : la course, la montée des escaliers…
2.3.2-Le torticolis spasmodique : est la forme la plus commune des dystonies; elle est localisée aux muscles du cou, elle entraîne des déviations posturales de la tête; le plus souvent rotation latérale qui s’accompagne d’une saillie du sterno-cléido-mastoïdien.
Ces contractions surviennent par accès durant de 20 à 40 secondes; ils ont tendance à devenir plus fréquents et plus prolongés ; parfois ils peuvent être inhibés par un geste correc- teur simple qui est toujours le même pour le même malade : par exemple, le simple contact du doigt sur le menton ou sur la joue (fig. 11).
2.3.3-Les dystonies de la face : peuvent revêtir plusieurs aspects :
- Crise oculogyres : accès de déviation conjuguée des globes oculaires le plus souvent vers le haut.
- Spasme médian de la face : le plus fréquent est le spasme orbiculaire réalisant le blépharospasme qui sont des accès d’occlusion incoercible des paupières.
- Crises de protraction de la langue.
2.3.4Les crampes fonctionnelles : la plus fréquente est la crampe des écrivains : elle affecte les doigts qui se crispent sur le stylo, ainsi que les muscles de l’avant-bras obligeant le malade à interrompre son écriture.
2.4. Le mouvement choréique est une agitation motrice involontaire, incessante et anarchique qualifiée de « folie musculaire ».
Elle est faite de mouvements brusques, explosifs, de durée brève, de siège et d’amplitude changeant sans cesse :
- Au visage : grimaces et mimiques sans rapport avec l’état émotionnel.
- Aux membres : mouvements amples de flexion-extension, haussement d’épaules.
- Au cou et au tronc : contorsions.
Le mouvement choréique s’accompagne d’une hypotonie, il perturbe le mouvement volontaire gênant la marche qui est désordonnée, entrecoupée de sauts ou de brusques enjambées (« danse de Saint-Guy »), les activités manuelles sont entravées : l’habillage, l’ali- mentation, l’écriture. Il est calmé par le repos et l’isolement, il disparaît pendant le sommeil;
il est exagéré par le mouvement volontaire et les émotions.
Valeur sémiologique : la chorée est une manifestation transitoire du rhumatisme articulaire aigu, de nature inflammatoire; plus rarement, elle est due à une atteinte dégénérative.
2.5Le mouvement ballique ou hémiballisme est dû à une hémorragie détruisant le corps de Luys.
Il réalise un mouvement d’apparition brutale et d’une grande violence prédominant à la racine des membres, essentiellement au membre supérieur qui est projeté en avant et en dehors avec tendance à la torsion et à l’enroulement en dedans. Le malade cherche à éviter le mouvement en fixant le bras atteint avec l’autre ou en le calant sous lui. Le mouvement se répète de manière stéréotypée pendant des périodes plus ou moins longues. Dans les formes sévères la mort peut survenir par épuisement.
Le mouvement ballique s’accompagne d’une hypotonie.
III.LES AUTRES TROUBLES MOTEURS :
Des troubles moteurs dont le mécanisme physio-pathologique est encore obscur, réalisant des mouvements anormaux, peuvent se voir : ce sont les tremblements, les myoclonies et les tics.
1.Les tremblements
Sont les plus fréquents des mouvements anormaux. Ils peuvent être physiologiques chez le sujet normal ou pathologiques, ils se voient alors dans de nombreuses affections.
1.1Définition : Déjerine les a définis comme : « des oscillations rythmiques involontaires que décrit tout ou partie du corps autour de sa position d’équilibre ».
1.2Les différents types de tremblement : les tremblements sont classés suivant leur circonstance d’apparition : tremblement d’attitude, tremblement de repos et tremblement d’action ou intentionnel.
1.2.1-Le tremblement d’attitude : il peut être physiologique ou pathologique.
- Chez le sujet normal : le maintien d’une attitude : position du serment, bras étendus en avant doigts écartés fait apparaître le tremblement physiologique essentiellement au niveau des mains; sa fréquence varie avec l’âge : 6 cycles/seconde jusqu’à 10 ans, puis 10 cycles/seconde à la puberté, ensuite il diminue de fréquence après l’âge de 50 ans. Il est habituellement invisible à l’œil nu. Il est augmenté par la fatigue et les émotions et il devient alors visible.
- Le tremblement d’attitude : exagération du tremblement physiologique se voit au cours de l’éthylisme, de la thyrotoxicose (hyperthyroïdie) et chez les sujets anxieux.
- Le tremblement d’attitude sans rapport avec le tremblement physiologique est constitué par des oscillations lentes : 4 cycles/seconde, il apparaît au maintien de l’attitude et persiste pendant le mouvement lent; il disparaît lors du mouvement rapide et au repos il est augmenté par l’émotion; il atteint le membre supérieur, le membre inférieur et la tête, il s’agit d’un phénomène bénin qui chez le sujet âgé porte le nom de tremblement sénile, il peut se voir également chez le sujet jeune, il a dans ces cas un caractère familial. Il est considéré comme d’origine cérébelleuse.
1.2.2-Le tremblement de repos (voir syndrome parkinsonien).
1.2.3-Le tremblement intentionnel : ou tremblement d’action : il s’agit d’un tremblement qui apparaît dès l’initiation du mouvement, il se poursuit pendant son exécution et peut se prolonger quelques instants après l’arrivée au but. Il est mis en évidence par l’épreuve du doigt sur le nez. Il est le signe d’une atteinte cérébelleuse et de la voie dento-rubro- thalamique.
1.2.4-Cas particulier du flapping tremor (tremblement en battements d’ailes) ou astérixis : il est observé au cours de certaines encéphalopathies notamment d’origine hépatique.
Il est mis en évidence au niveau de la main étendue à l’horizontale; il consiste en une brusque flexion du poignet avec chute de la main suivie d’un retour à l’horizontale: ces mouvements se répètent à intervalles plus ou moins réguliers en fait il ne s’agit pas d’un vrai tremblement.
2.Les myoclonies
2.1Définition : les myoclonies sont des contractions musculaires brèves et involontaires
génératrices ou non d’un déplacement segmentaire.
2.2Les différents types de myoclonies : selon Gastaut, les myoclonies peuvent être classées :
2.2.1-Suivant l’étendue et la répartition des territoires musculaires intéressés :
— Les mvoclonies parcellaires : la contraction intéresse un petit muscle ou des faisceaux isolés de muscles plus volumineux ne donnant lieu qu’à un déplacement minime.
- Les myoclonies segmentaires : les contractions intéressent plusieurs muscles d’un même segment entraînant un déplacement bref de ce segment. Ces myoclonies peuvent être localisées limitées à un territoire musculaire ou sporadiques atteignant de manière asynchrone plusieurs territoires.
- Les myoclonies massives : intéressent de manière simultanée et symétrique plusieurs segments; elles peuvent s’accompagner de chutes ou de projection d’objet.
2.2.2-Suivant la répartition dans le temps :
— Les myoclonies intermittentes : qui surviennent à intervalles longs et irréguliers.
— Les myoclonies permanentes : qui surviennent de façon rythmique à des fréquences de 1
à 8 par seconde pendant plusieurs heures ou plusieurs jours.
2.2.3-Suivant les circonstances d’apparition :
— Les myoclonies spontanées : surviennent en l’absence de tout facteur déclenchant décelable.
— Les myoclonies provoquées : par des facteurs déclenchants variés : stimulation lumineuse, le mouvement volontaire (myoclonies d’action); plus rarement stimulation sonores ou tactiles.
Ce sont des mouvements involontaires qui se répètent à intervalle variable, sans motivation extérieure, habituellement selon le même type chez un sujet donné, mais variable d’un sujet à l’autre. Ils ne s’accompagnent ni de troubles du tonus, ni de troubles de la motricité.
Le mouvement qui constitue le tic imite le mouvement volontaire; il peut d’ailleurs être reproduit volontairement.
Il s’agit le plus souvent de clins d’yeux, de grimaces, de haussement d’épaules, de mouvements du cou et de la tête.
L’apparition du tic est irrégulière et variable suivant l’état psycho-émotionnel du sujet; il peut être suspendu par la volonté ou lors du détournement de l’attention par une activité absorbante; il disparaît au cours du sommeil.
Valeur sémiologique : manifestation névrotique transitoire le plus souvent; plus rarement, il s’agit d’une séquelle d’encéphalite.
CHAPITRE VI
Les troubles de la sensibilité
I.RAPPEL ANATOMO-PHYSIOLOGIQUE DES VOIES DE LA SENSIBILITÉ (fig. 1)
On distingue deux modes de sensibilité : la sensibilité extéroceptive et la sensibilité proprioceptive.
-
- La sensibilité extéroceptive ou superficielle : recueille les sensations cutanées provo- quées par le tact, la douleur, le chaud et le froid.
- La sensibilité proprioceptive ou profonde : renseigne sur les attitudes et les déplace- ments segmentaires.
Ces deux types de sensibilité sont véhiculés par deux voies différentes : la voie spino- thalamique transmet les sensations thermo-algésiques, la voie lemniscale les sensations proprioceptives.
La sensibilité tactile emprunte les deux voies : spino-thalamique et lemniscale.
1.La voie spino-thalamique
1.1Les récepteurs : sont répartis sur l’ensemble des téguments.
- Les mécano-récepteurs sont sensibles au tact, à la pression, au déplacement des poils.
- Les thermo-récepteurs sont sensibles au froid et au chaud. Il n’y a pas de récepteurs spécialisés pour la douleur.
1.2Les voies : l’influx nerveux est transmis des récepteurs au premier neurone qui s’articule dans la corne postérieure de l’axe gris du même côté avec le deuxième neurone.
Le deuxième neurone croise la ligne médiane en avant de l’épendyme et gagne le cordon latéral opposé et remonte dans la moelle, le tronc cérébral et se termine au niveau du noyau ventro-postéro-latéral du thalamus.
Au niveau du thalamus, le deuxième neurone s’articule avec le troisième neurone et gagne le cortex pariétal rétro-rolandique dans l’aire 1, 2 et 3 de Brodmann.