Roumani_s Physiology

ÉLECTROGENESE CORTICALE ET ELECTROENCEPHALOGRAPHIE

A-Introduction

-L’enregistrement des ondes cérébrales est une donnée importante pour effectuer de nombreux diagnostics, notamment concernant les anomalies de la synchronisation comme l’épilepsie ou la narcolepsie.

-Les principes d’électrophysiologies mis en œuvre dans ce procédé sont très simples, mais ont été poussés à un niveau supérieur de précision afin de pouvoir enregistrer le reflet de l’activité cérébrale. A la base, la répartition inégale des charges entre le milieu intracellulaire et le milieu extracellulaire, à l’origine du potentiel membranaire, créé un semblant de dipôle électrique qui, par conséquent, créé un champ électrique. C’est ce champ électrique qui est capté et mesuré grâce à l’électroencéphalogramme.

B-Ondes cérébrales

-Afin de mesurer les ondes cérébrales l’on a recours à deux techniques :

1-L’électrocorticographie :

-C’est une méthode invasive qui nécessite de poser des électrodes à la surface du cortex et ainsi mesurer directement les variations de potentiel. Elle n’est à préconiser qu’en cas de diagnostic pré-chirurgical de l’épilepsie. Elle jouit par contre d’une relative précision des données enregistrées.

2-L’électroencéphalographie :

-C’est une méthode beaucoup plus courante et moins invasive. Elle consiste en la pose de plusieurs électrodes sur le cuir chevelu (aussi appelé scalp). Elle est indiquée en cas de coma, de troubles de la vigilance, pour diagnostiquer un état de mort cérébrale ou encore en cas de maladie de Creutzfeld-Jacob (vache folle)… La précision est ici beaucoup plus faible, car le signal est fortement atténué par les couches qui séparent le cortex de l’électrode, c’est-à-dire les méninges, le LCR, l’os, le tissu cellulaire sous-cutané, la peau, et les cheveux. Il est donc nécessaire d’utiliser des amplificateurs (comme des diodes) pour que le signal soit de l’ordre du µV.

-Lorsqu’il est atténué, le signal subit un changement, d’une part dans sa répartition spatiale et d’autre part dans son amplitude. C’est ce que l’on appelle phénomène d’étalement. Et c’est justement ce dernier que l’on souhaite réduire par l’amplification des signaux.

3-Rythme de base :

-Le tracé EEG est le reflet de l’activité cérébrale enregistrée par l’électroencéphalogramme. Le premier enregistrement de à la surface du cerveau a été effectué par Richard Caton en 1875. Depuis cette époque, la sensibilité à grandement évolué, si bien qu’en 1924, Hans Berger, neurologue allemand, a pu enregistrer un EEG sur scalp grâce à un galvanomètre à double bobine. Le résultat était encore peu précis.

Ce n’est qu’en 1932 que Berger a enfin pu obtenir un tracé fiable sur un adulte éveillé et au repos, grâce à un oscilloscope. Ce tracé formait un rythme à une fréquence de 10 Hz. Il l’a appelé rythme α.

R! Par convention, et en l’honneur des travaux du chercheur, le rythme α est encore appelé « rythme de Berger ». Il est observé chez 85% des adultes éveillés, au repos et les yeux fermés.–

4-Réactions d’arrêt :

-Lors de ses expérimentations, Berger a remarqué que l’ouverture des yeux interrompait le rythme α, en effet, le tracé devenait plus rapide et moins ample. Ce phénomène a été appelé désynchronisation (car un tracé rapide signifie plus de neurones activés indépendamment) ou encore accélération. Cette réaction est dite réaction d’arrêt visuelle. Elle peut être observée en cas d’activité mentale (même en gardant les yeux fermés) comme le calcul, dans ce cas elle sera dite réaction d’arrêt mentale. Le rythme est appelé rythme β.

C-Principe de l’EEG

1-Mise en place :

-L’EEG dispose en général de 21 électrodes disséminées sur le cuir chevelu et reliées à l’appareil d’enregistrement appelé têtière par des fils électriques. Leurs disposition n’est pas aléatoire, elle suit un système international posé par Herbert Jasper, c’est le système 10-20.

-Ce système est basé sur des mesures précises de la boite crânienne, de façon longitudinale et transversale. Par exemple, l’on mesure la distance entre le nasion (racine du nez) et l’inion (bosse occipitale). L’on pose la première électrode à 10% de la distance en partant du nasion, la seconde, la troisième et la quatrième à 20%, et la cinquième

-à 10% de la distance. Le même principe est suivi de manière transversale entre les deux oreilles. L’on se retrouve avec le schéma suivant :

2-Montage :

-Le montage peut être soit :

      • Longitudinal : c’est-à-dire que les différences de potentiel sont calculées entre deux électrodes en allant de l’avant de la tête, vers l’arrière (par exemple entre Fz et Cz puis Cz et Pz sur le schéma).
      • Transversal : c’est-à-dire que les différences de potentiel sont calculées entre deux électrodes en allant de gauche à droite (par exemple entre T3 et C3, puis C3 et Cz etc…).
      • Référentiel : c’est-à-dire que les différences de potentiel sont calculées entre une électrode et un potentiel de référence commun dit référence de Wilson. Cette référence n’est autre que la moyenne des potentiels de l’ensemble des électrodes.

-La têtière va amplifier et filtrer le signal et sera ensuite reliée à un ordinateur qui va transformer le signal analogique (donc des valeurs continues) en signal numérique, basé sur la notion de pixel (donc en valeur discrètes). La résolution de base pour un EEG standard est de 256 pixels par secondes.

R! Par convention, dans un EEG sur scalp, une onde positive sera orientée vers le bas, tandis qu’une onde négative sera orientée vers le haut. Le mécanisme sera expliqué plus loin.

D-Organisation du cortex

1-Colonnes fonctionnelles :

-Les neurones du cortex cérébral sont orientés perpendiculairement à la surface du cortex. Ils sont organisés en colonnes fonctionnelles. Chaque colonne inclut :

• Le soma du neurone.

• Son axone.

• Sa dendrite.

• L’interneurone qui le régule.

R! L’axone d’un neurone du cortex va envoyer une collatérale qui va s’articuler avec un interneurone inhibiteur.

-Chacune de ces colonnes est considérée comme un dipôle électrique et va donc produire un champ électrique. Ce dernier représente l’activité unitaire cérébrale. Les ondes formées par ces colonnes vont subir une sommation, tant spatiale que temporelle, au niveau cortical.

2-PPSE et PPSI :

-Il est important de noter que les potentiels recueillis par l’EEG ne sont PAS des potentiels d’action mais des potentiels locaux (PPSE ou PPSI). Ils sont sommables, étendus (dans le temps) et peuvent être synchronisés. Les potentiels d’action quant à eux ne sont pas sommables, ils sont fugaces et très rapides et du fait de leur apparition aléatoire ils ne peuvent pas être synchronisés.

-Lorsqu’un neurone est excité, il va se créer un PPSE au niveau de son dendrite. Après sommation, et si le potentiel gradué résultant est supraliminaire, le neurone va générer un potentiel d’action qui va cheminer le long de l’axone.

-Il faut garder en mémoire que l’axone d’un neurone d’une colonne fonctionnelle va donner une collatérale pour un interneurone inhibiteur. C’est également le cas ici. L’axone va conduire le potentiel d’action vers l’interneurone, ce dernier va recevoir un PPSE qui va générer un potentiel d’action (s’il est supraliminaire) pour ensuite venir inhiber par un PPSI le neurone en question (c’est un peu le principe d’inhibition récurrente par la cellule de Renshaw).

-L’onde enregistrée sera donc une onde positive (PPSE) suivie d’une onde négative (PPSI) (Un peu comme pour le cervelet par exemple).

 

-Lorsqu’une cellule subit un PPSE, elle devient chargée positivement du côté dendritique et négativement du côté axonique. Elle va de ce fait générer un champ électrique, tout comme un dipôle. Cependant, selon que la cellule soit en surface ou en profondeur, la perception de l’EEG diffère :

    • En surface : les vecteurs du champ magnétiques allant du pôle positif vers le pôle négatif (donc du haut vers le bas), et ces derniers butant contre la paroi de la boite crânienne, l’EEG verra les électrons s’éloigner de lui, enregistrant ainsi une onde vers le bas.
    • En profondeur : les vecteurs du champ magnétique allant toujours du pôle positif vers le pôle négatif (du haut vers le bas), mais cette fois-ci sans buter contre la paroi de la boite crânienne, l’EEG verra les électrons se rapprocher de lui avant de s’en éloigner. Il va donc enregistrer une onde vers le haut.

-Le phénomène est strictement inversé en cas de PPSI.

E-Activité rythmique

1-Synchronisation :

-Les neurones du cortex cérébral possèdent une activité rythmique autonome (pacemaker). La présence de circuits cortico-sous-corticaux, entre le cortex et les noyaux intralaminaires du thalamus, va permettre de réverbérer (réfléchir → amplifier) ce courant.

-A la naissance, le tracé de l’EEG est lent et ample (les neurones sont donc synchronisés). Plus l’âge avance, plus la fréquence augmente et tend vers le rythme α. L’on assiste donc à une désynchronisation neuronale due à une maturation cérébrale.

-Au cours du sommeil profond (dit sommeil à ondes lentes) par contre, les ondes ralentissent progressivement reflétant une synchronisation neuronale.

-Mis à part ces deux cas de figure, la synchronisation n’apparait qu’en cas de lésion de l’encéphale, par exemple lors d’une déafférentation cortico-sous-corticale (rupture des faisceaux thalamo-corticaux).

2-Principaux rythmes :

Onde Fréquence Amplitude Apparition Topographie
Alpha 8 à 13 Hz. 20 à 60 µV. Sujet éveillé, au repos, les yeux fermés. Surtout pariéto- occipital.
Bêta 14 à 30 Hz 2 à 20 µV Plus répandue, en état d’activité mentale. Surtout en frontal.
Thêta 4 à 7 Hz 20 à 100 µV Chez l’enfant surtout, également en somnolence. Surtout en temporal.
Delta 0.5 à 3.5 Hz 20 à 200 µV En sommeil profond, il est irrégulier. En éveil, présent en cas de tumeur ou d’infection.

3-Méthodes d’activation :

      • Ouverture et fermeture des yeux.
      • Hyperventilation → baisse de la PaCO2.
      • Stimulation lumineuse intermittente :
        • Sujet normal : entrainement du rythme cortical qui tendra à suivre le rythme lumineux.
        • Sujet épileptique : provocation d’anomalies ou crises épileptiques par hypersynchronisation.
      • Injections de substances pharmacologiques épileptogènes (amphétamines).

4-Artéfacts :

      • Courant électrique ambiant nécessité d’un filtre à 50 Hz.
      • Clignement des yeux.
      • Mouvements oculaires ou linguaux.
      • Sonnerie de téléphone…

F-Pointe-onde épileptique

-L’épilepsie est une atteinte du cortex, causant des décharges hypersynchrones des neurones épileptiques. Ces décharges sont appelées PDS pour Paroxysmal Depolarization Shift.

-Chaque neurone va recevoir une suite de PPSE qui, après sommation vont donner naissance à un PPSE géant (PPSEg). L’inhibition récurrente va ensuite envoyer plusieurs PPSI rapprochés qui, après sommation vont donner naissance à un PPSI géant (PPSIg). Le tracé obtenu représente la pointe-onde épileptique.

-Les phénomènes épileptiques à l’origine de cette pointe-onde sont appelés petit-mal ou absence. Ils surviennent chez l’adulte bien éveillé ou chez l’enfant.

 

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