Sérien bouzouaoui 2017-2018

Les troubles de la sensibilité

I.RAPPEL ANATOMO-PHYSIOLOGIQUE DES VOIES DE LA SENSIBILITÉ

On distingue deux modes de sensibilité :

-La sensibilité extéroceptive ou superficielle :

Recueille les sensations cutanées provoquées par le tact, la douleur, le chaud et le froid.

-La sensibilité proprioceptive ou profonde :

Renseigne sur les attitudes et les déplacements segmentaires.

Ces deux types de sensibilité sont véhiculés par deux voies différentes :

la voie spinothalamique → les sensations thermo-algésiques,

la voie lemniscale → les sensations proprioceptives.

les deux voies → La sensibilité tactile.

1.La voie spino-thalamique

 

1.1Les récepteurs

Répartis sur l’ensemble des téguments.

Les mécanorécepteurs : sensibles au tact, à la pression,

au déplacement des poils.

Les thermorécepteurs : sensibles au froid et au chaud.

Il n’y a pas de récepteurs spécialisés pour la douleur.

1.2Les voies

L’influx nerveux est transmis des récepteurs au premier neurone qui s’articule dans la corne postérieure de l’axe gris de la moelle spinale du même côté avec le deuxième neurone.

Le deuxième neurone croise la ligne médiane en avant de l’épendyme et gagne le cordon latéral opposé et remonte dans la moelle, le tronc cérébral et se termine au niveau du noyau ventro- postéro-latéral du thalamus.

Au niveau du thalamus, le deuxième neurone s’articule avec le troisième neurone et gagne le cortex pariétal rétro-rolandique dans l’aire 1, 2 et 3 de Brodmann.

2.La voie lemniscale

2.1Les récepteurs :

Situés dans les muscles, les tendons, les capsules et les ligaments articulaires.

2.2Les voies :

L’influx nerveux est transmis des récepteurs au premier neurone ou protoneurone qui monte dans la moelle dans le

cordon postérieur homolatéral sans croiser. L’ensemble des protoneurones forme les faisceaux de Goll et Burdach.

Au niveau du bulbe, le protoneurone s’articule avec le deuxième neurone ou deutoneurone qui croise la ligne médiane dans le bulbe et forme le ruban de Reil ou lemniscus médian qui monte dans le tronc cérébral en arrière du faisceau pyramidal d’abord prés de la ligne médiane, puis de plus en plus latéral et se termine dans le noyau ventro- postéro-latéral du thalamus.

Au niveau du thalamus, le deuxième neurone s’articule avec le troisième neurone de la voie spino-thalamique dans son trajet jusqu’au cortex pariétal.

Ainsi, les deux voies lemniscale et spino-thalamique sont nettement séparées dans la moelle et le bulbe, d’où possibilité de troubles sensitifs dissociés.

La longueur du premier neurone de la voie lemniscale qui va de la moelle jusqu’au bulbe le rend plus fragile aux diverses agressions.

II.ETUDE SÉMIOLOGIQUE:

Elle repose sur :

    • l’interrogatoire qui va préciser les troubles sensitifs subjectifs
    • l’examen clinique qui met en évidence les troubles sensitifs objectifs.

1.Les troubles sensitifs subjectifs

Ils peuvent être de deux types : les douleurs et les paresthésies.

1.1Les douleurs

Comme pour toute douleur, il faudra préciser :

Le type

Douleur pongitive à type de pesanteur ou d’écrasement
Douleur lancinante à type de battement
Douleur térébrante est une douleur pénétrante, traversant les tissus en profondeur
Douleur fulgurante est une douleur en éclair
Douleur causalgique est une douleur à type de cuisson ou de brûlure

Le siège

  • Il peut être localisé.

-Il peut être diffus prédominant aux extrémités ou à un hémicorps.

-Il peut suivre le trajet d’une racine rachidienne réalisant une névralgie radiculaire ; Ex :

la douleur de la sciatique de type L5 :qui descend à la fesse, à la face postérieure de la cuisse,à la face externe de la jambe, au dos du pied jusqu’aux 1ers orteils

Les circonstances d’apparition

-Douleur spontanée.

Douleur déclenchée ou augmentée par certaines manœuvres dans le cas d’une atteinte radiculaire.

    • Manœuvres qui augmentent la pression du LCR : toux, défécation, effort.
    • Manœuvre de Lasègue : qui est une manœuvre d’étirement des racines sciatiques (voir sémiologie de l’app locomoteur).

L’évolution :

Douleur brève en éclair se répétant par accès douleur de la névralgie du trijumeau.
Douleur prolongée ou permanente douleur de la polynévrite.

1.2Les paresthésies

Sont des sensations anormales habituellement non douloureuses et non motivées par un stimulus extérieur, de types divers : fourmillements, picotements,

sensations de ruissellement de courant d’air chaud ou froid, de courant électrique.

2.L’examen clinique

2.1Technique (voir examen neurologique).

2.2Résultats

L’examen clinique permet de mettre en évidence les troubles sensitifs objectifs suivants :

Une hypoesthésie : diminution de la sensibilité.

Une anesthésie : abolition de la sensibilité.

Une anesthésie douloureuse : est l’association dans un même territoire d’une anesthésie et de douleurs spontanées.

Une hyperesthésie : est une sensibilité accrue aux divers modes de stimulation.

Une hyperpathie ou hyperalgésie : est la perception sous forme de douleur d’un stimulus normalement non douloureux : chaud, froid…

Les troubles sensitifs objectifs peuvent:

-porter sur tous les modes sensibilité superficielle et profonde

-ou être dissociés, c’est-à-dire ne porter que sur l’une des deux.

III.LES DIFFÉRENTS SYNDROMES SENSITIFS

Nous classons les troubles sensitifs suivant la topographie des lésions en

    • troubles sensitifs périphériques : par atteinte du neurone périphérique

-troubles sensitifs centraux par atteinte des structures centrales.

1.Les syndromes sensitifs d’origine périphérique

Ils sont en rapport avec une atteinte soit des troncs nerveux, soit des racines.

Mononévrite Polynévrite Monoradiculite Polyradiculonévrite
l’atteinte

D’un seul tronc nerveux

l’atteinte symétrique

de plusieurs troncs nerveux

l’atteinte

d’une seule racine

l’atteinte

symétrique de plusieurs racines

Signes subjectifs douleurs et paresthésies

dans le territoire de distribution sensitive du nerf atteint.

Les douleurs peuvent être déclenchées ou ↗ par

la pression du tronc nerveux en certains points de son trajet.

douleurs profondes et paresthésies sont au premier plan,

douleur de type radiculaire (++++) :

  • suit le trajet de la racine,
  • déclenchée ou augmentée par les manœuvres qui augmentent la pression dans le LCR et par les

manœuvres d’étirement de la racine.

paresthésies (parfois).

sont au premier plan, à type :

-de paresthésie

-parfois de douleurs.

Signes objectifs hypoesthésie ou anesthésie à tous les modes dans le territoire de

distribution sensitive

-hypoesthésie cutanée(le +souvent)

-troubles de la sensibilité profonde (parfois)

sont habituellement discrets, à type : d’hypoesthésie à tous les modes dans

le territoire de distribution sensitive

habituellement absents; par contre, il existe ↓
-des troubles moteurs

dans le territoire de distribution motrice du nerf atteint.

-des troubles moteurs localisés

  • à la loge antéro-externe de la jambe au MI
  • aux muscles extenseurs des doigts au MS
-des troubles moteurs

sont également habituellement discrets.

des troubles moteurs : symétriques et diffus

intéressant les membres et les nerfs crâniens.

– la topographie des troubles est distale

(habituellement)

-La distribution Des troubles sensitifs subjectifs et objectifs est particulière :

  • bilatérale, symétrique distale
  • affectant une topographie « en gant »

ou « en chaussette ».

Le LCR : est caractéristique ;

→ une dissociation albumino-cytologique (hyperalbuminorachie

avec cytologie normale).

La tétanie

Un syndrome sensitivo-moteur évoluant par crises paroxystiques.

L’accès tétanique :

Comporte des troubles sensitifs et des troubles moteurs dont la répartition topographique est particulière;

→ils affectent les extrémités : mains, pieds, et la région péribuccale.

Les troubles sensitifs : sont constants.

Troubles subjectifs : à type de paresthésies : fourmillements et picotements, puis impression d’enraidissement.

Troubles objectifs : hypoesthésie tactile et profonde.

Les troubles moteurs :

Des contractions soutenues, involontaires et incoercibles d’intensité modérée, non douloureuses.

Lorsque les pieds sont atteints,

  • les orteils se mettent en flexion plantaire serrés les uns contre les autres,
  • la plante est creusée comme la paume de la main.

La main

prend une attitude particulière dite de « main d’accoucheur » :

  • le pouce en extension et adduction,
  • les doigts serrés les uns contre les autres à demi fléchis,
  • la paume est creusée par le rapprochement de ses deux bords; le poignet peut être en demi-flexion.

 

La crise commence par des troubles sensitifs débutant par les doigts et les orteils sans jamais dépasser le coude, ni le genou, puis apparaissent les troubles moteurs.

La durée de la crise va de quelques minutes à quelques heures.

Chez le jeune enfant :

-l’attitude du poing est la plus fréquente,

– la contracture péri buccale peut réaliser des attitudes de moue ou « de museau de carpe » et il existe des risques de laryngospasme entraînant une apnée.

 

Entre les crises

Des troubles sensitifs objectifs à type d’hypoesthésie tactile des doigts peuvent persister. On recherchera :

le signe de

Chvostek

qui est la contraction de l’orbiculaire des lèvres lors de la percussion de la joue

au milieu d’une ligne unissant le lobule de l’oreille et la commissure labiale

le signe de Weiss qui est la contraction de l’orbiculaire des paupières lors de la percussion de l’angle externe de l’œil
le signe de Lust qui est la contraction des muscles de la loge antéro-externe de la jambe

lors de la percussion du sciatique poplité externe au col du péroné

Si ces signes sont (-) :

signe de Trousseau

on essaiera de déclencher un accès tétanique par l’épreuve du garrot qui consiste à poser sur le bras pendant 10 minutes un garrot ischémiant, puis à l’enlever, chez le tétanique cette manœuvre déclenche un accès

Signe de Chvostek

 

Signe de Trousseau

 

Les causes des tétanies

-l’hypocalcémie,

-l’alcalose et l’hypokaliémie,

– les tétanies idiopathiques (sans cause décelable)

2.Les syndromes sensitifs centraux

Ils peuvent avoir pour origine une atteinte de la moelle, du bulbe, du thalamus ou du cortex.

2.1Au niveau de la moelle

Le syndrome médullaire complet

Se voit dans les paraplégies qui réalisent une lésion complète de la moelle,

– soit par section médullaire (post-traumatique),

-soit par compression.

On observe alors une anesthésie ou hypoesthésie à tous les modes dans le territoire situé au-dessous de la lésion.

La limite supérieure du trouble de la sensibilité à une valeur capitale pour le diagnostic topographique de la lésion médullaire surtout en cas de compression médullaire.

Les syndromes médullaires partiels

Peuvent revêtir plusieurs aspects :

Une lésion de l’hémi-moelle droite ou gauche réalise le syndrome de Brown-Sequard

Du côté de la lésion : Du côté opposé à la lésion :
– des troubles de la sensibilité profonde.

– des troubles moteurs à type de paralysie.

– des troubles de la sensibilité thermo-algésique.

Une lésion des cordons postérieurs réalise le syndrome cordonal postérieur

Des troubles sensitifs subjectifs -la douleur fulgurante ou douleur en éclair (la + caractéristique).
Les troubles sensitifs objectifs vont porter uniquement sur la sensibilité profonde -Une ataxie l’ensemble des troubles moteurs apparaissant lors de la fermeture des yeux

(en rapport avec un trouble de la sensibilité profonde) :

-troubles du maintien des

attitudes

avec signe de Romberg et signe de la main instable ataxique :

on demande au sujet de maintenir ses mains tendues en avant, doigts écartés; lors de la fermeture des yeux, la main et les doigts présentent des oscillations

-troubles des mouvements – troubles de la marche →démarche talonnante

-anomalies du mouvement finalisé : → dysmétrie

(le mouvement est mal dirigé, hésitant et le but est manqué).

-Une abolition de la sensibilité vibratoire au diapason.

-Une perte du sens de position segmentaire des membres.

-Une astéréognosie1

Il n’y aura pas de troubles de la sensibilité thermo algésique d’où le nom de dissociation tabétique :

-ce tableau a d’abord été décrit dans le tabès (syphilis nerveuse),

-il peut se voir également au cours de l’avitaminose B 12.

Une lésion centro-médullaire

Située autour du canal épendymaire, Va entraîner :

-des troubles isolés de la sensibilité thermo-algésique « en bande » ou « suspendue »

-avec conservation de la sensibilité profonde,

c’est la classique dissociation syringomyélique ou dissociation thermo-algésique (Décrite dans la syringomyélie 2).

La lésion centro-médullaire intéresse :

en hauteur

seulement quelques segments médullaires au niveau du renflement cervical

D’où l’aspect suspendu des lésions
en largeur

non seulement les fibres spino-thalamiques, mais aussi la corne antérieure

D’où l’association caractéristique :

  • anesthésie thermo-algésique en bande
  • avec conservation de la sensibilité profonde ;
  • paralysie avec amyotrophie siégeant au niveau de la ceinture scapulaire, des bras et des mains;
  • troubles trophiques des membres supérieurs.

Valeur sémiologique : la syringomyélie, les tumeurs intramédullaires.

1 perte de la reconnaissance palpatoire des objets

2 Maladie qui s’accompagne d’une cavitation centro-médullaire de nature primitive en rapport avec une malformation congénitale

2.2Au niveau du bulbe

L’atteinte de la région latérale du bulbe réalise le syndrome de Wallenberg qui est un syndrome sensitif alterne VS : dû à un ramollissement du bulbe par ischémie artérielle dans le territoire vertébro-basilaire.

Du côté de la lésion

en effet parmi les noyaux sensitifs du V seul le noyau spinal est touché, car il s’étend sur toute la hauteur du bulbe et il est le relais des afférences thermiques et douloureuses;

les autres noyaux du V en particulier, le noyau principal qui est le noyau de la sensibilité tactile siège au niveau de la protubérance,

-une hypoesthésie ou une anesthésie thermo-algésique dans le territoire du V avec conservation de la sensibilité tactile

-un syndrome de Claude Bernard Horner,

  • un syndrome vestibulaire
  • un hémisyndrome cérébelleux.

Du côté opposé à la lésion

-une hémi-anesthésie thermo-algésique des membres supérieurs et inférieurs

  • une hémiparésie peut être observée.

Réalisant avec l’anesthésie faciale du côté de la lésion

le syndrome sensitif alterne


2.3.Au niveau du thalamus 

C’est le syndrome capsulo-thalamique de Dejerine-Roussy

la lésion intéresse le noyau postéro-ventral du thalamus et déborde sur la capsule interne et les radiations optiques;

il va se manifester du côté opposé à la lésion :

-Des troubles sensitifs subjectifs à type d’hyperpathie.

-Des troubles de la sensibilité profonde

-des troubles de la sensibilité thermo-algésique.

-Une hémianopsie latérale homonyme.

-Une hémiparésie.

2.4. Au niveau du cortex

Des lésions du cortex pariétal vont entraîner des troubles sensitifs de la moitié opposée du corps,

souvent limités à une partie du corps du fait de l’étalement de la représentation somatotopique sensitive.

Troubles de la sensibilité profonde (+++) :

– trouble du sens des positions sédentaires

-astéréognosie.

Les troubles de la sensibilité superficielle

-seulement à type d’hypoesthésie

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